Cela nous permet d’insister maintenant sur la quatrième raison. Quand le Saint-Père ou le Concile du Vatican parlent d’Eglise particulière, par rapport à l’Eglise Universelle, c’est pour bien marquer l’articulation qui existe entre un diocèse et toute l’Eglise ( LG . 13 , 34 & LG. 23, 49 ) et ( Exhortation sur l’Evangélisation du Monde, D.C. 1974, 14 ) : « Cette Eglise Universelle s’incarne de fait dans les Eglises particulières constituées de telle ou telle portion d’humanité concrète, parlant telle langue, tributaire d’un héritage culturel, d’une vision du monde, d’un passé historique, d’un substrat humain déterminé. L’ouverture aux richesses de l’Eglise particulière répond à une sensibilité spéciale de l’homme contemporain ». Mais quand on insiste sur la mission spécifique d’une Eglise particulière, diocèse ou groupe de diocèses, qui est de planter l’Evangile au cœur d’un peuple déterminé et de sa culture, on parle aussi d’Eglise locale. Le caractère local de notre Eglise ne s’arrête du reste pas à ses propres limites géographiques ; la Conférence Episcopale des Evêques du Pacifique-Sud, ou C.E.PAC., peut être considérée comme une extension de notre caractère local ( D.C. 1974, intervention des évêques au Synode, p. 978 ). C’est ainsi que tout naturellement nos élèves séminaristes se dirigent sur le Séminaire Régional de Suva.
La vie religieuse peut aussi accentuer le caractère local de notre Eglise. Les filles de Jésus Sauveur, fondation de Mgr Paul MAZE, ancien Archevêque de Papeete, malgré leur progression lente et modeste, témoignent d’une volonté de vie religieuse de polynésiennes en Polynésie ? Ce qui compte n’est peut-être pas en effet une extension rapide, mais régulière et suffisante pour que ce soit bien au cœur de notre population que le témoignage d’une vie selon les préceptes évangéliques soit porté, que des jeunes filles du pays puissent s’organiser en vie de communauté est un autre aspect d’un témoignage d’Eglise. Que leurs rangs restent ouverts à toutes manifeste encore leur capacité d’être attentives au Tahiti d’aujourd’hui.
Volontairement aujourd’hui nous n’énumèrerons pas « les éléments qui constituent la personnalité du Territoire », car les points de vue peuvent varier d’un observateur à l’autre. Contentons-nous de rappeler que toute culture, même si en 200 ans elle s’est sensiblement transformée et enrichie d’apports extérieurs valables, se confond avec sa population, d’où émerge en ce moment une volonté d’exercer plus de responsabilité.
Comment des jeunes gens et des jeunes filles, si précoces parfois, à envisager un grand idéal de vie, ne verraient-ils pas que l’Eglise les attend pour donner à une Polynésie en transformation les guides spirituels dont nos catholiques ont besoin et qui n’oublieront jamais que Prière, Amour, Justice doivent apparaître en ceux qui veulent se donner totalement à Dieu et à leurs frères et qui savent que tout se construit finalement autour de l’Eucharistie.
Par ses fidèles, par leur vie paroissiale, ses groupes de chant, ses « katekita », et bientôt ses diacres, les « Pupu Rotario Ora », le « Nuu o Maria », par ses éducateurs généreux en union avec nos Frères et nos Sœurs, l’Eglise est déjà locale. Elle doit l’être par des prêtres, des Frères et des Sœurs du Pays. Encore une fois, il ne s’agit pas là d’un couronnement, ajouter quelque chose à un organisme déjà vigoureux : il s’agit de tirer cette vigueur de la seule source à laquelle on peut légitimement aller : la jeunesse de notre pays … Si de cette jeunesse ne se lèvent pas les quelques vocations dont nous avons besoin dans les 10 ans qui viennent, notre Eglise sera privée d’une certaine note d’authenticité. Car qu’est-ce une Eglise qui ne subsiste pas par elle-même, et qu’est-ce qu’une Eglise qui n’éprouve pas le désir d’être un jour missionnaire ?
La signification des vocations sacerdotales et religieuses aujourd’hui est simple : témoigner à la fois d’un grand amour de notre pays et de sa population, malgré les plus grandes incertitudes sur son avenir, mais aussi d’un grand amour de l’Eglise. Des jeunes se donnant totalement au Seigneur selon les grandes exigences de l’Evangile, apporteraient cet élément de « confiance spirituelle » si nécessaire chez nous en ce moment. Seuls des jeunes totalement désintéressés par leur vocation essentiellement spirituels pourraient aider nos chrétiens à sauvegarder dans notre société polynésienne actuelle toutes les valeurs qui l’ont constituée, et à en implanter d’autres au fur et à mesure qu’elle continue d’évoluer. Le combat de le Foi nécessite non pas uniquement des convictions, qui seraient stériles si elles n’étaient qu’intérieures, mais aussi l’engagement des hommes.