2001 - En entrant dans le nouveau millénaire

Lettre Pastorale

En entrant dans le nouveau millénaire

Au clergé, aux religieux, aux ministres laïcs, et à tous les fidèles du diocèse de Papeete. À vous tous, paix et joie dans le Christ Jésus. Il est vivant à jamais !

Frères et Soeurs,

 

Introduction

Depuis 4 ans, nous avons vécu un parcours spirituel qui nous a certainement permis d'avancer dans la vie chrétienne : année du Fils, année du Saint-Esprit, année du Père, puis année jubilaire pour marquer le deux millième anniversaire de l'Incarnation. Il ne faudrait pas maintenant que nous perdions les fruits de ces quatre années en nous laissant aller.

Que faire pour que cette année 2001 ne soit pas une année de recul spirituel, mais au contraire une année qui, tout en étant moins mouvementée, moins extraordinaire, que l'année 2000, permette à chacun de nous et aussi à notre Eglise locale de continuer à progresser ?

Le Saint-Père peut nous aider à travers la lettre qu'il a signée le jour de l'Epiphanie 2001 et dont le titre latin peut se traduire : "En entrant dans le nouveau millénaire ..."

Le Pape trace un programme en trois points que nous pouvons adopter. Par cette lettre pastorale, je voudrais présenter les grandes lignes de ce programme et en même temps proposer aux paroisses, aux institutions, aux communautés de l'étudier pour l'adapter à leur situation particulière et surtout pour qu'elles réfléchissent sur les moyens concrets de le réaliser.

Voici les trois points de ce programme :

1° - Un visage à contempler ;
2° - Etablir un programme pastoral inspiré par le premier point ;
3° - Développer une spiritualité de la communion fraternelle.

 

 

1°- Un visage à contempler

Avant de nous lancer dans l'action, commençons par contempler le mystère du Christ, même si finalement dans la réalité quotidienne il nous faudra mener de front approfondissement de notre contemplation et engagement dans l'action. Poursuivons notre réflexion sur l'Incarnation commencée depuis la préparation du jubilé.

Les disciples de Jésus ont commencé par suivre un maître spirituel dont les paroles et les actes ne cessaient de les étonner. Ils se disaient :"Mais quel est donc cet homme ?" Ils ont fini par trouver une première réponse que Pierre a exprimée à Césarée de Philippe : "Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivan !".(Mat. 16/16) Mais leur découverte s'est encore approfondie par la suite, en particulier par la passion de Jésus et sa résurrection, mais aussi après la résurrection lorsque l'Esprit les a conduit peu à peu vers la "vérité toute entière". (Jean 16/13)

Chacun de nous doit effectuer, au cours de sa vie, un semblable parcours dans lequel le visage du Christ, sans cesser de rester mystérieux, va lui apparaître avec de plus en plus de relief et de force.

Visage de Jésus-Christ, vrai Dieu et vrai homme, visage du Christ souffrant, visage du Ressuscité ... voilà quelques-uns des points qui sont offerts à notre méditation, mais aussi sans doute pouvons-nous la prolonger en contemplant le Coeur miséricordieux de Jésus, le mystère de sa Présence dans l'Eucharistie ...

Le pape énumère quelques-uns des moyens à mettre en oeuvre :

- une lecture plus fructueuse des Evangiles. Une telle lecture devra être d'abord attentive, attentive aux faits et aux événements, aux préceptes et aux conseils, mais surtout à la personne de ce Maître aimant qui vient à nous à travers sa Parole. Sans doute nous faut-il prendre pour modèle Marie, la soeur de Marthe, qui assise aux pieds de Jésus ne se lassait pas d'écouter son Maître. (Luc 10/38-42).

- la voie de la foi. La foi est un don de Dieu, ce que Jésus a souligné quand il a dit à Pierre, qui venait de proclamer qu'il était le Christ, le Fils du Dieu vivant : "Ce n'est pas la chair et le sang qui t'ont révélé cela , mais mon Père qui est dans les cieux.".(Mat. 16/17) Mais la foi est aussi la réponse de l'homme à ce que Dieu lui révèle et il dépend aussi de nous que cette réponse soit de plus en plus généreuse.

- une prière plus vraie qui aboutit à une contemplation de la gloire de Dieu.

 

 

2° - Un programme pastoral

Ce programme pastoral est dans la continuation du premier point. Il s'agit de faire connaître, aimer, imiter le Christ.

L'imitation du Christ doit nous conduire à la sainteté. Il ne faut pas avoir peur de ce mot, il ne faut pas le parer d'images extraordinaires : actions hors du commun, miracles, ascèse spectaculaire. La sainteté c'est se laisser transformer par Dieu, en se rendant de plus en plus disponible à sa Volonté et à sa Grâce.

Chaque paroisse, chaque communauté devra étudier concrètement comment réaliser ce programme en tenant compte des possibilités et de ses besoins, en s'efforçant de remédier aux lacunes les plus graves, en s'appuyant sur les ressources particulières dont elle dispose.

Cependant ce programme devra suivre les grandes lignes d'action que trace le pape dans sa lettre :

a) Apprendre l'art de la prière. Faire découvrir, malgré toutes les difficultés et les sécheresses, que la prière est un dialogue d'amour, qui prend de multiples formes : prière personnelle silencieuse, prière liturgique des laudes et des vêpres, prière spontanée des groupes de prière que le Renouveau charismatique a largement répandue dans notre diocèse. Travailler pour que les prières collectives (en particulier tout ce qui est chanté) soient de plus en plus vraies et profondes et que la partie musicale ne s'inspire pas des modèles grossiers et profanes, tels par exemple celui des boîtes de nuit.

b) Redécouverte du jour du Seigneur dont la célébration de l'Eucharistie est le centre. Cette Eucharistie dominicale doit revêtir de plus en plus son caractère de célébration de la Pâque du Seigneur et puiser sa beauté dans la foi qu'elle exprime. La messe dominicale doit être un moment où les coeurs retrouvent la joie de la foi, s'unissent à Jésus s'offrant à son Père, manifestent leur espérance. Elle doit être aussi un moment de rencontre des chrétiens en Jésus, d'expression de la communion fraternelle.

c) Retrouver toute la valeur du sacrement de réconciliation dont certains se sont lassés à force de le mal vivre. D'autres le pratiquent de manière légaliste et n'y trouvent aucunement une rencontre avec Celui que ses ennemis appelaient : "l'ami des pécheurs", le Seigneur miséricordieux. Que ce sacrement devienne de plus en plus expression du repentir, de la confiance dans la miséricorde de Dieu, la recherche de la sainteté.

d) Insister sur le primat de la grâce. Jésus nous dit : "Sans moi vous ne pouvez rien faire". (Jean 15/5). Beaucoup de fidèles se sont lancés dans de grands efforts de conversions et ils ont abouti à un échec qui les a découragés. Un peu comme ces disciples de Jésus qui "avaient peiné toute la nuit" sans prendre aucun poisson.(Luc 5/5). Qu'ils découvrent que, dans le domaine spirituel, nos efforts n'ont aucune efficacité s'ils ne sont pas accompagnés par la grâce. En toutes choses il faut agir avec Dieu, mais il faut aussi être constamment attentif à ne pas refuser la grâce.

e) L'écoute de la Parole de Dieu doit avoir une place de plus en plus prépondérante dans notre vie et nous préparer à évangéliser. Il faut s'évangéliser soi-même pour être capable d'évangéliser le monde. L'évangélisation par de multiples moyens et dans toutes les directions sera notre réponse au sécularisme et au matérialisme envahissant qui s'infiltrent partout en transformant notre société. A travers les retraites, les visites à domicile et d'autres moyens, de gros efforts sont déjà faits dans notre diocèse, mais il y a encore des milieux et des personnes qui ne sont pas touchés, aussi faut-il encore développer l'évangélisation.

f) Dans notre pastorale, depuis longtemps il y a des priorités : la famille, les vocations, mais il faut ajouter aussi les jeunes. Cette année ayant été déclarée : "année de l'enfant polynésien", il nous faudra porter notre attention sur l'éducation des enfants, sur toutes les agressions dont les enfants sont victimes.

 

3° - Une spiritualité de la communion fraternelle.

La communion fraternelle est la force tout à fait spécifique qui unit les chrétiens en une seule Eglise. La communion fraternelle plonge ses racines dans la foi qui rend les chrétiens frères et soeurs parce qu'ils ont un même Père, un même Maître et Sauveur, qu'ils ont reçu le même baptême et sont nourris de la même Eucharistie et de la même Parole. Cette communion crée une solidarité profonde et elle s'épanouit en amour fraternel. C'est par la communion fraternelle que les premiers chrétiens avaient "un seul coeur et une seule âme." (Actes 4/32).

S'il n'y avait pas cette communion, l'Eglise disparaîtrait aussitôt. Il est donc très important que nous développions une spiritualité de la communion fraternelle

Cette spiritualité sera une attention à tout ce qui fait l'unité des chrétiens, une lutte continuelle contre tout ce qui les divise, un regard qui donnera la priorité à tout ce qui est positif dans l'autre, plutôt qu'à ce qui est imparfait ou insatisfaisant.

Un des instruments de l'unité dans l'Eglise est le ministère confié par Jésus à Pierre et qui se continue maintenant dans celui du Pape. Ce ministère sera d'autant plus efficace que nous donnerons toute notre confiance au Saint Père et garderons envers lui une affection filiale. Mais une réflexion sur la communauté fraternelle doit aussi nous aider à développer des relations entre prêtres, diacres, évêques, ministres et fidèles qui soient de plus en plus fraternelles et empreintes de simplicité en même temps que de confiance et de soumission réciproques.

La communion fraternelle est aussi la clé d'un véritable oecuménisme. Entre les catholiques et les autres dénominations chrétiennes qui existent dans notre Polynésie, il n'y a pas une parfaite communion puisque sur un certain nombre de points notre foi diffère, mais il y a cependant une certaine communion puisque tous croient en un seul Dieu et Père, en un seul Maître et Sauveur, en un seul Evangile. Nous devons donc nous efforcer de développer avec tous des relations de plus en plus respectueuses et fraternelles.

La spiritualité de la communion fraternelle nous rendra attentifs à des paroles de Jésus telles que celles-ci : "Ce qui montrera à tous les hommes que vous êtes mes disciples, c'est l'amour que vous aurez les uns pour les autres" (Jean 13/35) ; "Qu'ils soient un pour que le monde croie que c'est Toi qui m'as envoyé" (Jean 17/21).

La spiritualité de la communion fraternelle nous conduit à bâtir la civilisation de l'amour. Essayons de bâtir cette civilisation dans toutes les cellules d'Eglise en commençant par nos familles, mettons notre coeur à transformer toutes les relations à l'intérieur de l'Eglise pour qu'elles soient de plus en plus conformes à ce que Jésus attend de nous. Cet effort nous préparera à changer aussi nos relations avec tous les autres hommes, à leur témoigner, avec beaucoup d'humilité, du respect, de l'amitié, de la compréhension. Nous essaierons aussi d'être attentifs à tous les laissés-pourcompte de la société, tous les exclus, tous ceux qui souffrent en nous rappelant que Jésus nous demande de Le reconnaître en eux.

 

Comment utiliser cette lettre ?

Cette lettre sans prétentions n'a pas d'autre but que de nous aider à construire un programme pastoral d'année en nous inspirant des propositions du Saint Père. Je souhaite que, dans les paroisses et les diverses communautés chrétiennes, des groupes de réflexion se constituent à l'initiative des responsables. Voici quelques questions qui vous aideront à conduire votre réflexion :

Premier point : contempler le visage du Christ

Comment , à votre avis, peut-on arriver à une lecture plus fructueuse de l'Evangile ?

Quelles sont les principales lacunes dans la foi des chrétiens qui vous entourent ? Comment pourrait-on aider les fidèles à approfondir leur foi ? Que pensez-vous de votre foi personnelle ?

La prière occupe-t-elle une grande place dans votre vie ? Quel type de prière ? Comment le silence fait-il partie de la prière ? Qu'est-ce que vous pensez d'une "Ecole de prière" ? Comment les Clarisses pourraient-elles nous aider à mieux prier ?

Voyez-vous d'autres moyens pour progresser dans la découverte du mystère du Christ ?

Que signifie pour vous l'incarnation de Jésus ? Avez-vous quelque chose à dire sur Jésus-Christ vrai Dieu et vrai homme ? Pensez-vous souvent aux souffrances supportées par Jésus ? Qu'est-ce que ses souffrances signifient ? Qu'estce que la pensée du Christ ressuscité et toujours vivant apporte à votre vie. Que pouvez-vous dire du coeur miséricordieux de Jésus ? Est-ce que sa présence dans l'eucharistie vous attire ? Pourquoi ?

Deuxième point du programme : bâtir une pastorale

Comment faire connaître et aimer le Christ ? Comment comprenez-vous l'imitation de Jésus ? Comment un simple fidèle peut-il arriver à la sainteté ?

Quels sont les principaux défauts des prières communautaires dans votre paroisse ou votre communauté ? Quels progrès peuvent être accomplis ?

Que faire pour que le jour du Seigneur soit mieux respecté ? quelles améliorations pourraient être faites pour que la messe soit vécue comme la célébration du mystère pascal, pour qu'elle soit en même temps plus vivante et plus joyeuse ?

Le sacrement de la réconciliation est-il bien utilisé ? Comment aider les fidèles à mieux en profiter ?

Les fidèles comprennent-ils l'importance de la grâce ?

Comment organiser l'évangélisation ? Importance de l'accueil ? des visites à domicile ? Comment utiliser les retraites qui sont organisées dans le diocèse ? Te vai ora ? Comment le suivi des retraites est-il organisé dans votre paroisse, dans votre groupe ? Importance du témoignage ? quels sont les secteurs, les groupes sociaux qui sont mal évangélisés ?

Que peut-on faire pour la famille ?

Pour les jeunes ?

Pour les vocations ?

Pour les enfants ?

Pour l'insertion des jeunes dans la paroisse après la confirmation ?

Troisième point : Une spiritualité de la communion fraternelle

Avez-vous bien compris ce que signifie ces mots : "communion fraternelle" ? Qu'est-ce qui affaiblit la communion fraternelle ?

Comment voyez-vous les relations entre évêques, prêtres, diacres, tavini, religieux et religieuses et les autres fidèles ? Y a-t-il des choses à changer ?

Quel rapport voyez-vous entre la communion fraternelle et des instances comme le C.P.P et le C.A.E. ?

Y a-t-il un oecuménisme possible en Polynésie ?

Y a-t-il quelque chose à améliorer dans l'action de l'Eglise vers les malades, les pauvres, les prisonniers, les exclus ?

Autres priorités ?

Rédaction d'un programme d'année

Après avoir réfléchi à plusieurs reprises sur ces questions, il faut en arriver à écrire un programme d'année. Cela pourrait être, en dernière instance, la tâche du CPP qui choisira ce qui est le plus important. Mais ceci ne devrait venir qu'après avoir associé au maximum les fidèles à la réflexion.

Autre option :

Certains groupes se spécialiseront avantageusement dans une question particulière. Par exemple, un groupe de réflexion pourrait se créer pour réfléchir sur la vocation. L'A.F.C. pourrait étudier ce programme en rapport à la famille. Dans certaines paroisses, un groupe de réflexion pourrait se constituer pour relier ce programme à la pastorale des jeunes. Il serait bon aussi que certains groupes étudient plus spécialement la prière. Des groupes pourraient se spécialiser dans la réflexion sur les enfants Et ainsi de suite ...

Mgr Hubert COPPENRATH,

Archevêque de Papeete

Le 14 février 2001

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