1914 - Revue d'Apologétique

Revue d’Apologétique n°219 – Tome XIX – Décembre 1914 pp.233-234

L'épiscopat et la guerre.

Aux trois évêques présents actuellement sous les drapeaux et que mentionnait notre chronique de Glanes apologétiques, il faut ajouter Mgr Hermel, vicaire apostolique de Tahiti, qui est aussi mobilisé. On a eu la délicatesse de lui assigner les fonctions d'aumônier militaire pour son diocèse même. Or, on sait que la guerre s'est portée un instant jusqu'en Tahiti. Deux croiseurs allemands bombardèrent, le 22 septembre, Papeete, sa ville épiscopale. Tout un quartier fut incendié. La petite garnison tahitienne ayant riposté par une canonnade violente, l'ennemi crut à des troupes nombreuses et partit. Cet événement fit paraître le courage des vaillants, mais suscita aussi chez quelques autres une panique exagérée. Ceux-ci eussent voulu qu'on s'abstînt de toute résistance : « Si le fait du 22 se reproduit, laissons-nous rançonner sans mot dire ; toute défense de notre part serait folie. Notre poignée de soldats peut-elle être opposée à la puissante armée allemande ? » Ainsi parlaient-ils.

Le dimanche suivant, Mgr Hermel prêcha dans sa cathédrale. Ce fut pour rendre honneur aux autorités civiles et militaires qui avaient décidé la résistance des jours précédents ; ce fut aussi pour montrer les raisons de la mesure prise et pour faire la leçon aux ...timides. De cette leçon paternelle, mais précise, l'évêque fut chaleureusement remercié par l'officier de marine qui commande à Papeete. Dans sa lettre, l'officier loue d'abord le dévouement du clergé, « prêtres et frères » ; puis il ajoute :

« En ce qui vous concerne personnellement, Monseigneur, je ne puis que vous témoigner ma respectueuse admiration et vous remercier ici au nom de l'armée dont je suis le représentant.

Pour vous rendre au poste le plus dangereux, où vous appelait votre devoir d'aumônier militaire, vous avez gravi sous le feu de l'ennemi la pente entière, découverte, exposée, qui mène aux batteries. Une fois arrivé, vous avez contribué puissamment, par votre autorité morale et votre courage, au maintien du calme et du sang-froid.

Hier encore, du haut de la chaire, dans un magnifique élan oratoire, illuminé du plus pur patriotisme, vous avez su dire comment Papeete, par son attitude ferme et courageuse, a évité la honte d'une capitulation ennemie. Vous n'avez pas hésité à stigmatiser ceux qui, avant l'alerte, parlaient de se rendre et qui, après l'alerte, critiquent les mesures prises ; ces mauvais Français n'ont cessé d'exercer leur détestable influence tant avant que pendant le combat ; à ce moment, ils avaient fui.

Je vous remercie de ces paroles qui prenaient dans votre bouche une singulière autorité, du fait même que vous aviez dû les faire précéder par des actes. »

Et il signe : « Le commandant des troupes : DESTREMEAU, lieutenant de vaisseau. »

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