Tahiti 1834-1984 - Chap. VII

 

DEUXIÈME PARTIE

L'APPEL DES ÎLES LOINTAINES

 

 [pp.109-228]

 


 

Chapitre 7

Autres communautés chrétiennes

[pp.149-162]

 

L'âme tahitienne est réceptive à l'aspect religieux de la vie, des événements et des choses. Cet esprit naturellement religieux, comme nous l'avons déjà signalé, se traduit par une grande sensibilité affective, un instinct communautaire très marqué et, en même temps, par un besoin de sécurité légaliste, un profond relativisme à l'égard d'une vérité universelle et une grande fierté à l'égard de son groupe particulier. En plus de la vision culturelle propre aux maohi, l'espace-temps si particulier aux îles polynésiennes permet de saisir une telle sensibilité si déroutante pour les esprits rationnels européens.

Géographie et histoire permettent de comprendre la diversité des groupes religieux en Polynésie, en plus de l'attrait instinctif des Polynésiens pour tout ce qui est nouveau. La proximité des État-Unis qui se sont intéressés à la Polynésie dès 1813 augmente ce phénomène. On compte actuellement aux U.S.A. plus de 10 000 sectes sans cesse renouvellées. En effet, après leur indépendance, les États-Unis sont apparus comme la terre de liberté pour les aventuriers, les dissidents, les réfugiés, les inventeurs de toutes sortes. Contrairement à la France qui les a aidés à l'origine, les États américains fédérés n'ont pas opposé liberté individuelle et liberté d'association, en particulier religieuse. De plus, dans les conditions très mouvantes d'un pays immense, neuf, vivant un brassage sans précédent de langues et de groupes, constitués souvent de marginaux, d'exilés avec de fortes personnalités, les Églises établies et officielles étaient mises de côté au même titre que le « Vieux Continent » européen dont on s'était débarrassé sur le plan politique. Le premier peuplement était surtout de formation protestante et très marqué par le « libre-examen ». La Bible, livre unique, était reçue et interprétée par des gens sans grande culture théologique et dans le contexte d'un « Nouveau Monde » à conquérir. Il n'est pas étonnant que ce soit plutôt les prophéties de l'Ancien Testament, les visions prospectives et merveilleuses de l'Apocalypse, les promesses de la « Terre Promise, des cieux nouveaux et de la terre nouvelle » qui aient fait vibrer ces nouveaux pionniers d'autant plus patriotes qu'ils avaient tout à construire après avoir totalement rompu avec l'ancien monde.

C'est dans ce contexte apocalyptique de fin d'un monde rejeté et de naissance d'une société nouvelle désirée, qu'il faut situer le bouillonnement religieux des État-Unis en ce XIXe siècle commençant. Il en sortira les Mormons en 1829, les Adventistes en 1831, les Témoins de Jéhovah en 1870, pour ne citer que les principales Confessions qui intéressent particulièrement la Polynésie. Depuis l'ouverture de l'aéroport international de Faaa en 1961, le développement du tourisme et des échanges culturels avec les États-Unis après 1970, la prolifération des sectes américaines, en particulier en Californie liée directement à Tahiti, ne sont pas sans conséquence sur la Polynésie.

 

Mormons et sanitos

Mormons et Sanitos[1]

Le 22 septembre 1827, sur la colline de Cumorah, près de Palmyra dans l'État de New York, Joseph Smith (1805-1844) découvre deux plaques d'or gravées de hiéroglyphes avec 2 pierres (l'Urim et le Thummin) lui permettant de les déchiffrer. Leur traduction donnera le livre de Mormon en 1830. Le messager de Dieu Moroni qui avait révélé ces plaques à J. Smith, les reprit et personne ne les a plus revues. L'Amérique qui aurait été peuplée, selon ces révélations, de quatre grandes civilisations venant de Babylone et de Palestine dès 2200 ans avant J.C., serait désormais le nouvel Israël, le centre de l'Église nouvelle, la Jérusalem à venir. D'où le titre officiel des Mormons : « Église de Jésus-Christ des Saints des derniers jours ».

Jusqu'au 6 octobre 1890, ils admettaient la polygamie, ce qui leur causera bien des ennuis aux États-Unis et en Polynésie ; dans l'émeute de Nauvoo qui les chasse de l'Illinois, Joseph Smith périt le 27 juin 1844. Les Mormons émigrèrent près du lac Salé en 1847 sous la direction de Brigham Young qui y fonda l'État du Déseret (1847-1869). Il s'intégra en 1850 à la Fédération des États-Unis grâce à la construction du chemin de fer du Pacifique et deviendra, en 1896, l'État de l'Utah où les Mormons ont la haute main sur l'économie et le gouvernement. Ils donnent abondamment, dès l'âge de 12 ans, les divers titres bibliques de diacres, prêtres, évêques, apôtres, prophètes... Ils pratiquent le baptême pour les morts, d'où l'existence d'un gigantesque fichier généalogique à Salt Lake City. De plus, tout jeune mormon entre 18 et 20 ans doit accomplir une mission d'évangélisation à l'étranger ; ce qui se fait par groupes de deux.

La famille de Joseph Smith se sépara de Brigham Young, le deuxième prophète, successeur du fondateur, et qui admettait la polygamie pour un peuplement rapide (il avait 17 épouses et 56 enfants). La famille Smith soutenait que cette conception était contraire aux enseignements du fondateur. C'est ainsi que naquit « l'Église réorganisée de Jésus-Christ des Saints des derniers jours », appelée Sanito ou Kanito dans le Pacifique.

La première équipe missionnaire mormone, composée de Addison Pratt, Knowlton F. Hanks, Noah Rogers et Benjamin F. Grouard, est désignée par Joseph Smith le 11 mai 1843 à Nauvoo pour aller à Hawaii. Ils quittent le fondateur le 1er juin 1843 et s'embarquent à New Bedford le 9 octobre sur le « Timoleon », baleinier en partance pour Tahiti ; il n'y avait pas de navire pour Hawaii à ce moment-là. Hanks étant décédé en cours de route, Pratt, Rogers et Grouard arrivent à Tubuai le 30 avril 1844 où Pratt reste à la demande des habitants. Le 15 mai 1844 le « Timoleon » arrive à Papeete avec Rogers et Grouard. On est en pleine « guerre de Tahiti » et le Gouverneur Bruat ne voit pas d'un bon œil l'arrivée de missionnaires américains alors qu'il est en grande difficulté avec Pritchard et les anglais. Peu de gens veulent écouter ces missionnaires qui viennent « préparer le retour prochain du Fils de l'Homme sur terre », et les tahitiens « ne veulent pas offenser les missionnaires anglais, persuadés qu'ils sont que les missionnaires commandent à la nation britannique qui va repousser les français ». Après la mort de Mac-Kean et le départ de presque tous les anglais de la L.M.S., Grouard voit une chance pour eux ; pendant que lui-même prêche à Tahiti, Rogers missionne à Huahine. Ils n'ont pas grande réussite.

En avril 1845, après huit jours de voyage, Grouard arrive à l'atoll d'Anaa aux Tuamotu. Trois semaines après, il fait ses premiers baptêmes par immersion qui ont grand succès. En septembre, 620 personnes sont baptisées. Il n'hésite pas à rebaptiser, car le baptême pour lui, est d'abord un rite de pénitence et de purification[2]. Il célèbre la Cène avec du coco germé et de l'eau de coco en place de pain et de vin. En avril 1845, il épouse Tearo, membre de la communauté d'Anaa, sa femme restée aux U.S.A. ne lui répondant pas. Pour travailler avec son collègue Pratt, Grouard met en chantier trois baleinières : « Anaura », « Messenger » et « Ravaai ». Ces bateaux font le commerce entre les îles ; de plus les Mormons pratiquent la dîme stricte pour faire vivre leur communauté. Suite aux lois restrictives de 1850 réglementant les moyens de subsistance des missionnaires pour protéger les populations des îles, de 1851 et 1852 sur l'élection des pasteurs, Grouard quitte Papeete en juillet 1852 avec l'ensemble des Mormons américains.

Pendant ce temps, Pratt avait eu un succès rapide à Tubuai ; il y avait appris de nombreux chants en tahitien, En 1846, après avoir aidé Grouard à Anaa et devant leur réussite, il décide de retourner aux États-Unis en 1847. Là il lance un cours de langue tahitienne et intéresse les mormons à la Mission. Un groupe de trois : Pratt, Hunt et Brown arrive à Papeete le 24 mai 1850, suivi de 21 autres peu après. Mais les difficultés faites par l'Administration pour s'assurer que tous avaient les moyens de vivre par eux-mêmes, le renouveau des mœurs païennes, les excès de la « bringue », « l'abusive négligence de son Église et de ses amis d'Amérique » qui les abandonnent, l'ennui et la peur de leurs femmes, tout cela fait que les missionnaires mormons quittent en 1852.

Ils reviendront quarante ans plus tard avec Brown en 1892. Ils sont bien implantés aux Tuamotu et dans la banlieue de Papeete, dans le quartier de Fariipiti où ils ont un « Pieu » inauguré en 1981. L'image des jeunes mormons américains cravatés et allant deux par deux à pied ou à bicyclette faisant un inlassable porte à porte est familière à tous les Polynésiens et leur est plutôt sympathique. Leur action sociale est appréciée par l'abstinence totale d'alcool, de tabac et d'excitants. Leurs assemblées sont gaies, détendues, chantantes, ce qui n'est pas pour déplaire aux Tahitiens[3]. Les chorales mormones et sanitos sont réputées à juste titre, le chant et la musique ayant une place majeure dans leur culte. De plus les cours d'anglais, les liens fréquents avec les États-Unis ajoutent un attrait certain.

La Mission Sanito est installée à Tahiti depuis 1873. Si, de l'extérieur peu de choses les différencie des Mormons, en fait leur style de présence est très différent ; il est tout de discrétion. Ils sont grands experts en musique et en langue tahitienne. Depuis 1897, ils éditent un journal : « Te Orometua » (le maître). Ils ont bâti à Fare-Ute en 1961 un ensemble de salles vastes et bien équipées autour d'un temple agréable.

Si les effectifs de ces deux Églises sont modestes - autour de 3 à 4 000 pour chacune - leur présence culturelle, leur influence sociale, leur rayonnement par la formation professionnelle et artisanale des jeunes, dépassent largement les limites de leurs communautés confessionnelles.

Comme le font remarquer D. Mauer et L. Jore, Mormons et Sanitos ne font pas partie de la famille Réformée Protestante ; car « échappe au Protestantisme tout groupe religieux, même issu de la Réforme, qui reconnaît à côté de la Bible, une seconde Révélation écrite »[4]. De même les Adventistes, habituellement classés parmi les groupes protestants, refusent cette assimilation ; ils forment une communauté à part.


[1] D. MAUER : Aimer Tahiti, pp.139-150. - Quid 1980, pp.566-567.
- Mémorial polynésien. T. Il, pp.378 à 395.
- O'REILLY : Tahitiens, art. Grouard, Pratt, Rogers.
- Ar. SS.CC. : C. FOUQUÉ 73, 2 à 7 ; F. LOUBAT 62, 3 ; A. MONTITON 73, 3.
- F.O.M. Océanie, cartons 13,25,98 et 106.
- Livre de Mormon, 1830. Mission française, Paris 16e.
[2] C. FOUQUE à ses parents, lettre du 18-8-1849, Ar.SS.CC. 73,2 - 23-4-1852 à Mgr DOUMER, Ar.SS.CC. 73,21.- H. LAVAL à V. SOUCHAIS ; Faarava : 23-7-1849, Ar.SS.CC. 68,1 - J.B. HEBERT à Mgr T. JAUSSEN : 9-3-1852, Ar.SS.CC. 62,2.
[3] P. MAZE au T.R.P., lettre du 14-2-1939, Ar.SS.CC. 59,1.
[4] D. MAUER, op. cit., p. 144.
- L. JORE : L'Océan Pacifique. T. l, pp. 66-67.

 

Adventistes

[5] C'est aussi en Nouvelle-Angleterre, comme pour Joseph Smith, que William Miller (1782-1849) lança le mouvement Adventiste. À partir des prophéties de Daniel, il se fixa sur le retour glorieux du Christ qui devait se produire le 22 octobre 1844. Il eût rapidement du succès jusqu'au jour annoncé qui se passa sans que le Seigneur parut. Certains pensèrent que ce non-événement était une punition pour le manque de respect du sabbat selon la stricte loi biblique du repos du septième jour. Ceux qui suivirent R. Preston et les époux J. et G. White dans cette interprétation constituèrent les « Adventistes du 7e Jour » par opposition aux « Adventistes du 1er Jour » qui restaient fidèles au dimanche, premier jour de la semaine et « jour du Seigneur ».

En 1874, Charles Taze Russell (1852-1916) fut le prophète-fondateur des « Témoins de Jéhovah » à partir des Adventistes. Les Témoins de Jéhovah s'implantèrent à Tahiti à partir de 1958.

Sous l'impulsion d'un pasteur australien, A.J. Read, un premier noyau d'« Adventistes du 7è Jour » se constitue à Tahiti en 1892. Paul Deane demande au Directeur de l'Intérieur, le 6 septembre, l'autorisation de « faire des Conférences religieuses à Arue », lieu de son domicile. Le Commissaire de Police, Roffidal, transmet le 10 septembre le refus de l'Administration avec « prière de se soumettre à la décision ». Les néophytes ne comprenant pas les motifs d'un tel arrêt, leur pasteur Read s'adresse au Président du Conseil Général dès le 13 septembre : « Il ne me semble pas logique que notre culte, accepté et librement enseigné dans la France même, puisse être proscrit dans ses Colonies », contrairement aux grands principes qu'abrite le drapeau tricolore : « Liberté, Egalité, Fraternité ». Une discussion vive se déroule au Conseil Général entre les Conseillers et le Directeur de l'Intérieur ; elle se termine par la décision de «promulguer dans la colonie la loi du 30 juin 1881 sur les réunions publiques».

Les Adventistes constituent un groupe fervent, une communauté solide, un bloc soudé autour de la stricte observance du sabbat de l'Ancien Testament du vendredi soir au samedi soir. Cette rigueur légaliste et littérale de style judéo-chrétien, si elle est source de quelques difficultés pour la vie sociale et situe les Adventistes un peu en marge, n'est pas pour déplaire à un certain fond polynésien aimant quelque peu la sécurité d'un littéralisme biblique et un conformisme uniformisé à l'intérieur de groupes restreints. On retrouve un comportement moral proche de l'attitude des premiers missionnaires anglais de la L.M.S. et exprimé par le Code Pomaré du 15 mai 1819.

Les Adventistes ont un vaste temple, entouré d'un ensemble de salles spécialisées avec une librairie, dans le quartier de Taunoa à Papeete ainsi que diverses chapelles ailleurs. Ils exercent une influence certaine, quoique discrète, par leurs publications variées, leurs émissions à la Radio et leur style communautaire à la fois sécurisant et immuable.


[5] D. MAUER, op. cit., pp. 144 à 146.
- Mémorial polynésien. T. IV, pp. 96 à 98.
- Quid 1980, p. 566.

 

Autres groupes religieux

En Polynésie, comme ailleurs dans le monde actuel, la prolifération des sectes et des groupes religieux pose une importante question de société et interpelle les Églises. L'ouverture de Tahiti aux influences internationales depuis vingt ans, le développement rapide des contacts touristiques familiaux et estudiantins depuis 1970 avec la côte Ouest des États-Unis (mode, musique, drogue, etc.) amplifient ce phénomène qui a eu déjà quelques conséquences dramatiques chez les jeunes depuis 1979 surtout[6]. L'étude des motivations réalisées par Justin Tching sur les jeunes et la drogue à Tahiti aujourd'hui, même si elle ne vise pas directement la question des sectes, n'est pas sans intérêt pour comprendre ce phénomène social actuel. On peut regrouper ses observations en remarques générales sur les jeunes et en remarques spécifiques à Tahiti.

Le désœuvrement après la sortie de l'école, le phénomène des bandes (copains, quartiers, sports), la curiosité entretenue par la publicité, les chansons et les films à la mode, le désir de vouloir tout expérimenter par soi-même en opposition avec le monde des adultes, la recherche effrénée du plaisir pour lui-même, les problèmes familiaux qui font que beaucoup de jeunes « vivent chez eux comme des étrangers », autant d'aspects des conditions de vie d'une partie de la jeunesse en Polynésie qui se retrouvent malheureusement dans bien d'autres pays et en Métropole.

D'autres éléments sont propres à la Polynésie, ou bien certains comportements universels y prennent un visage particulier, une certaine « manière polynésienne ».

« La jeunesse tahitienne est très fascinée par la mode américaine. Les jeunes étudiants s'habillaient comme les jeunes américains et les copains les enviaient beaucoup... À San Francisco ou à Honolulu, la “Marijuana” est presque en vente libre ; les étudiants étaient persuadés de la non-toxicité et disaient qu'elle avait des effets très agréables. Ils employaient des mots américains pour qualifier les sensations qu'ils ressentaient. Ils aimaient écouter en même temps de la musique très rythmée, la “pop-music”. Désormais cette fascination atteint toutes les couches sociales et les diverses ethnies ».

L'attrait traditionnel des Polynésiens pour toute nouveauté, la fierté naturelle qui fait qu'on a honte de « se dégonfler devant les autres pour n'être pas éjecté du groupe », le goût du particularisme s'exprimant par des mots nouveaux, des signes caractéristiques, des vêtements spécifiques, sont des réalités auxquelles les maohi sont très sensibles ; la vie en groupe est une donnée socio-culturelle essentielle en Polynésie. La solidarité naturelle devient vite complicité dans des îles où chacun se connaît ; on profite de la gentillesse des grands-mères pour cultiver le cannabis et personne ne peut se dénoncer sans être compromis. L'instabilité des familles, les conséquences d'un alcoolisme destructeur font que la grande masse des jeunes est livrée à elle-même. L'image publicitaire qu'on donne de Tahiti et des polynésiens ne contribue pas à structurer des personnalités équilibrées.

Un tel contexte local déstabilisé, un tel environnement général en crise, retentissant l'un et l'autre dans des îles dispersées à forte vie communautaire facilitent l'attraction des sectes ou les tendances aux particularismes locaux dans les Églises qui vont parfois jusqu'à la rupture pure et simple de l'Église-Mère et la constitution de nouveaux groupes indépendants. Le fait que la Bible soit pour tous, le livre de référence, l'habitude des discussions bibliques privilégiant l'interprétation personnelle de préférence à son message de vérité et à ses appels à la conversion, facilitent l'éclatement en groupes divers. On oublie aisément qu'« aucune prophétie de l'Écriture n'est affaire d'interprétation privée ; en effet, ce n'est pas la volonté humaine qui a jamais produit une prophétie, mais c'est portés par l'Esprit-Saint que des hommes ont parlé de la part de Dieu »[7]. La Bible n'est pas une pâte molle ; les valeurs évangéliques ne sont pas inconsistantes.

La situation actuelle nous rapproche étrangement des nombreuses divisions, des coteries, du foisonnement des faux prophètes et des faux docteurs dans les premières communautés chrétiennes[8]. Il faut bien comprendre le besoin profond de chacun de vivre à plein, d'être heureux et en bonne santé. La foi ne peut se vivre que comme espérance ; l'apport essentiel de la Bible est que l'Histoire a un sens, que l'homme n'est pas le fruit du hasard absurde ou de la nécessité aveugle : en Jésus chacun est « appelé par son nom ». Mais le danger - le péché - c'est que chacun se mette au centre de tout et « décide de ce qui est bien et mal »[9]. La foi en Jésus-Christ, le Vivant ressuscité, transmise par les Apôtres et dont l'Église a le « dépôt », nous « centre sur Lui qui est le Chemin, la Vérité et la Vie »[10]. Il n'y a pas opposition entre l'épanouissement de l'homme et la foi au Christ, entre le bonheur des hommes et la vie en Église, entre la liberté individuelle et la communauté fraternelle, entre la connaissance scientifique rationnelle et la vérité de la foi manifestée en Jésus-Christ ; la réflexion et l'observation le montrent. Mais une situation de crise, les difficultés de la vie, le désir de chaque groupe socio-culturel d'être reconnu dans sa personnalité originale augmentent les égoïsmes individuels et collectifs. On a peur de perdre en « partageant les fardeaux les uns des autres » ; on craint d'être noyé en s'ouvrant à l'universel, de n'être qu'un numéro anonyme dans un ensemble trop vaste. Le refuge si tentant dans les nombreuses sectes sécurisantes ou groupes religieux chaleureux pose la question si importante de la « localisation de l'Église » et des « communautés de base ». La tentation est grande en Polynésie de créer son église à soi et ainside se servir de Jésus-Christ au lieu de le servir, de trier dans la Parole de Dieu au lieu de l'accueillir en sa totalité, de l'interpréter pour son propre projet au lieu de la recevoir dans sa vérité.

En plus de la vie communautaire chaleureuse et sécurisante si prisée par les Polynésiens, les diversités confessionnelles obligent à s'interroger sur les survivances païennes ancestrales. Nous avons déjà signalé la remarque du Pasteur Raapoto disant que « l'Évangile n'avait pas pénétré le fond des cœurs, qu'il y avait plus imitation extérieure qu'assimilation intérieure ». Inutile de citer les innombrables lettres similaires des missionnaires catholiques ou protestants, voire des rapports très sceptiques de beaucoup de Gouverneurs. L'ambiguïté de la remise en honneur de diverses cérémonies et coutumes pour une « authenticité maohi » est évidente et certains promoteurs ne cachent pas leurs sentiments antichrétiens. La crainte des revenants (« tupapau »), des sorts, de certains lieux maudits, des interdits anciens, des « tapu »... montre que la « libération réalisée par le Christ pour que nous soyions vraiment libres » n'est pas encore bien acquise[11].

L'exemple le plus célèbre est celui de la secte des Mamaia, signalée au chapitre III. Si ce mouvement syncrétique, alliant mœurs débridées et foi chrétienne, lancé par Teau, diacre protestant de Punaauia en 1827, n'atteignit jamais le stade d'une communauté structurée, il n'en représentait pas moins une utilisation pervertie et introvertie de l'Évangile. Le soutien de la Reine Pomaré IV et sa volonté, en 1830, d'être reçue par les Chefs selon les anciennes coutumes païennes risquaient de détruire les effets de la conversion officielle de 1819[12]. Ce « vaudou » polynésien met en lumière toute la différence entre dire la foi et vivre selon la foi ; « la loi de la chair s'oppose à la loi de l'Esprit »[13] et les fruits de la conversion du cœur mûrissent lentement à l'image de la longue croissance des cocotiers. La maîtrise de soi pour vivre selon l'« amour du Christ répandu dans nos cœurs par l'Esprit-Saint » est le fruit d'une conquête de libération intérieure.

De plus la secte des Mamaia posait brutalement la difficile question des liens entre foi chrétienne et culture locale. Si l'on considère la religion comme un simple élément d'un équilibre social à un moment donné et dans un lieu précis, si on la regarde comme le fruit des peurs naturelles et de l'ignorance des hommes - les dieux n'étant que la projection de leurs fantasmes culturels - il est évident que l'arrivée d'une nouvelle vie religieuse renverse les us et coutumes ; en Polynésie, ce fut d'autant plus radical que la situation socio-politique locale était en pleine déliquescence et que les premiers missionnaires venaient tout uniment pour christianiser et civiliser. L'expérience montre que le progrès social se fait plus par « mutations » brusques que par évolution tranquille, que la rencontre entre les groupes humains est plus « dialectique » - au sens de Hégel - que naturellement harmonieuse. Le regretter 150 années après n'y change rien, d'autant que les « changements » sociaux, politiques ou culturels sont toujours d'actualité. Il est difficile de reprocher aux anciens une attitude qu'on trouve naturelle dans le monde d'aujourd'hui.

Dans la période post-coloniale présente, l'Église sait mieux distinguer, grâce à l'apport des « Sciences Humaines », les domaines de la Foi et de la culture ; elle s'efforce de les unir dans la communion d'Églises locales sœurs, à la fois différentes et complémentaires. Ces questions actuelles feront d'objet de la dernière partie.

 


 

[6] Justin TCHING-CHI- YEN : Le Cannabis et les jeunes de Tahiti, mémoire pour le diplôme d'infirmier. Papeete 1982, 30 pages.
[7] 2P 1, 20-21 (traduction de la T.O.B.).
[8] Voir : Jude 4 ; 2 P 2 ; 1 Jn 4,1-6 ; Ga 2,1-10 ; 1 Co 1,10 à 4,21 ; Mt 7,15-20.
[9] Gn 3,5.
[10] 1 Tm 6,20 ;  2Co 5,14-15 ; Jn 14,6.
[11] Ga 5,1.
[12] P. Th. DE DECKKER : J.A. Moerenhout, pp. 158 à 162. - L. JORE : L'Océan Pacifique. T. Il, p. 56. - Ch. VERNIER : Tahitiens d'hier, p. 151.
[13] Ga 5,13-26.

 

État français et groupes religieux

La multiplicité des groupes religieux en Polynésie, le fait que diverses sectes venaient d'une Amérique dont l'expansionnisme était redouté, la conception globalisante de ces confessions anglo-saxonnes ont toujours posés à l'État français de difficiles questions. Dans la conception de plus en plus laïque et sécularisée qui aboutira, en 1905, à la Séparation des Églises et de l'État et qui se traduira par une attitude très restrictive, voire persécutrice parfois, à l'égard de ses propres groupes religieux nationaux[14], on comprend la méfiance susceptible de l'Administration française à Tahiti en même temps que sa prudente réserve à l'égard d'étrangers, sources possibles de complications internationales. L'« affaire Pritchard » de 1844, avec le conflit anglo-français évité de justesse, pèsera lourd.

Au sortir des difficultés avec les anglais de la L.M.S. et les Mormons américains en 1852, c'est le Gouverneur Page qui exprime le plus crûment la position de l'Administration d'État[15].

« À Taïti l'action du Gouvernement s'exerce avec une puissance presque irrésistible (26 mars... Nos crises sont passées. L'Autorité est partout respectée et partout obéie (22 juin)... Le sentiment religieux est secondaire dans ce pays... L'influence des missionnaires anglais est non pas détruite, car d'un bond elle se relèverait ; mais, sous moi, elle est annulée. Il s'agit de leur porter les derniers coups. Je prie qu'on m'envoie de France des instituteurs qui auront dans leur programme l'enseignement de la langue française... Il faut des instituteurs qui reçoivent et respectent le mot d'ordre du Gouvernement… Quant au culte, il n'est pas douteux un instant que, pour moi, en peu d'années, le catholicisme, en tant que religion du Gouvernement, ne puisse devenir la forme religieuse de la grande majorité du pays. Mais, pour cela, il faut des prêtres qui soient soumis au Gouvernement, car hors de lui rien ne se peut. Un curé et deux vicaires, de simple bon sens pratique, qui ne seraient pas dominés et enchaînés par l'esprit de corporation, qui sauraient pactiser avec la nécessité des circonstances, suffiraient au début. Que le Ministre croie bien que je ne me laisse pas entraîner par un zèle convertisseur ; s'il convenait au Gouvernement d'envoyer des ministres protestants, Taïti protestante serait aussi essentiellement française que Taïti catholique. Je penche pour le catholicisme afin de rompre avec la tradition de l'Angleterre, mais à la condition qu'il soit gouvernemental et non point un pouvoir religieux faisant échec au pouvoir de l'État (5 décembre)... »

On ne saurait être plus cyniquement clair : la foi religieuse se réduit à un culte contrôlé par l'Administration et au service du Pouvoir d'État. C'est de l'absolutisme politique. Dans des styles variés selon les circonstances, ou de manière plus subtile et enveloppée, ce sera la position constante des Gouverneurs successifs, face à « la grande part que prend ici, dans toutes les questions, l'influence religieuse. Il importe donc que cette influence ne domine pas l'action de l'Administration mais que celle-ci arrive à s'en servir en inspirant confiance aux cultes »[16]. La rigueur du centralisme napoléonien - le Code Napoléon sera étendu à Tahiti le 14 décembre 1865 - l'héritage de la Rome Impériale, libérale à l'égard de tous les cultes à condition de reconnaître la primauté absolue de l'Empereur-dieu, sont très frappants dans le type de la présence administrative française en Polynésie, au moins jusqu'en 1920[17].

Puisque telle était l'attitude à l'égard du Protestantisme, religion officiellement reconnue (voir chapitre VI) et du Catholicisme, « religion de la majorité des Français » mais non reconnu officiellement à Tahiti, on comprend le regard soupçonneux du Gouvernement sur les autres groupes religieux d'obédience non française, américaine surtout. Le Gouvernement avait été mal impressionné par la campagne d'opinion en Angleterre et animée par la L.M.S., « réclamant l'émancipation de Taïti sous le prétexte que la Reine Pomaré n'était engagée qu'envers la Royauté et qu'elle devenait indépendante à l'égard du nouveau Gouvernement républicain issu de la Révolution de 1848 ». Les explications embrouillées de W. Howe avaient incité le Gouverneur Lavaud, appuyé par Bruat, à demander des Ministres protestants français en 1849 et en 1850[18]. Les décrets de 1850 réglementant la perception de la « dîme » et contrôlant les moyens de subsistance des missionnaires, ceux de 1851 et de 1852 limitant les déplacements des missionnaires étrangers, constituaient les premières manifestations administratives de la méfiance officielle.

L'activité missionnaire des premiers Mormons avec M. Grouard fut discrète à Tahiti ; le Gouverneur Bonard leur avait imposé un règlement strict en cinq points[19].

  1. 1.     « Les missionnaires Mormons se borneront à prêcher leur religion sans se mêler en aucune manière des affaires politiques ou civiles.
  2. 2.     Ils s'abstiendront d'attaquer les religions établies et les Autorités.
  3. 3.     Ils n'exigeront aucun droit en argent ou en nature.
  4. 4.     Ils n'infligeront aucune pénalité pour les manques à leur religion.
    1. 5.     Ils ne pourront acquérir aucune propriété foncière sans l'approbation du Gouvernement. »

Il en fut tout autrement aux Tuamotu où il y eut rapidement plus de 800 baptêmes mormons dans l'île d'Anaa (La Chaîne), après leur arrivée le premier mai 1845. Les missionnaires catholiques arrivèrent à Faaite le 19 mai 1849. La compétition fut vive, d'autant que les préjugés antipapistes et antifrançais étaient puissants. Est-ce le fruit des restrictions administratives imposées par le Gouvernement, toujours est-il que l'excitation contre la présence française prit corps en octobre 1851 et ira s'amplifiant jusqu'au drame du 9 novembre 1852. Le passage de la flotte anglaise de l'Amiral Moresby en août 1852 donna corps aux rumeurs les plus folles. L'agitation prenant des proportions dangereuses, le capitaine de Bovis arriva à Anaa le 24 septembre à bord du « Phoque » pour une opération de pacification qu'il réussit parfaitement sans aucun drame. Selon les ordres du Gouverneur Page et le règlement de 1850, le culte mormon fut dissous à Anaa. Il faut se souvenir que les ministres américains avaient déjà presque tous quitté Tahiti en juillet 1852 ; le dernier, James Brown, rentrera aux Etats-Unis en novembre, « découragé devant l'opposition des hommes et l'oubli de son Église et de ses amis en Amérique ».

Chacun crut l'affaire réglée et l'agitation politique terminée ; la population d'Anaa s'était soumise et les chefs avaient été remplacés. En fait, il n'en était rien. Après le départ du « Phoque », les guerriers continuaient à s'exercer. Une querelle éclate au début de novembre à Putuahara entre l'ancien chef Mapeura et le nouveau Taneopu. Mapeura proclamait : « J'étais mormon ; je soutiendrai toujours les Américains et les Anglais contre les Français. » Le brigadier de gendarmerie Viry, averti le 6 novembre, attend quelques jours pour que les esprits se calment. Il se rend le 9 à Tekotika, accompagné de Derrien son interprète. Si Mapeura reconnaît s'être mis en tort, son oncle Tefaitiuga se rebelle et menace Viry. Le brigadier se décide à l'arrêter ; Viry est alors cerné et tué à coups de lances et de massues. C'était le signal de la révolte contre les Français. Le drapeau américain est hissé. La mission catholique est pillée ; le P. Clair Fouqué est laissé pour mort au bord du lagon et le P. Ferréol Loubat est blessé. Un noyau de 12 fidèles se regroupe autour d'eux. Deux baleinières sont envoyées au Gouverneur Page à Tahiti les 9 et 20 novembre avec l'annonce de l'assassinat du brigadier et de la mort du P. Fouqué. Le Gouverneur l'annonce à Paris mais n'envoie de secours à Anaa que le 4 décembre, car il s'efforçait de se défausser en rendant le P. Clair Fouqué responsable des incidents[20].

La répression, sous les ordres du lieutenant Parchappe, fut sévère ; il y eut cinq pendaisons dont celle de Temutu, un catholique innocent accusé sur faux témoignages. Au grand scandale du gendarme Eon, Parchappe permit aux Tahitiens de saccager toute la mission catholique. Il déclara la mission catholique illégale et transforma les Mormons en Protestants, reconnus comme seuls légaux. De tels excès suscitèrent de vives protestations des gendarmes et des européens[21]. Pour finir, le Gouverneur Page, malgré ses rapports sur « l'autorité du Gouvernement établie contre les religions », fut blâmé et remplacé par le Ministre de la Marine[22].

Cette douloureuse affaire, entièrement politique et non religieuse aux dires du P. Fouqué et de Parchappe eux-mêmes, eut de graves conséquences sur les relations entre l'État français et les Églises. Nous étudierons au chapitre XVII, celles qui concernent l'Église Catholique. Pour les Mormons, et d'une manière générale les confessions religieuses d'origine américaine, la méfiance plus ou moins marquée fut la règle.

« Le Gouvernement américain semble vouloir exercer un véritable protectorat sur tous les adhérents des deux sectes, Mormons et Sanitos, fussent-ils français, écrivait le Gouverneur Jullien. Une pareille théorie est inadmissible, ayant pour conséquence l'intervention d'une puissance étrangère dans nos affaires sous apparence de protéger telle ou telle secte religieuse ; j'estime que la discussion même du principe est dangereuse pour notre autorité sur les indigènes »[23].

Cette question avait pris une grande importance aux yeux du Gouvernement français à cette époque incertaine précédant l'ouverture du canal de Panama ; des bruits étaient répandus un peu partout de l'abandon de Tahiti et des E.F.O. par la France. Le Ministre des Affaires Étrangères transmet en 1905 à son collègue des Colonies « une lettre du Commandant de la division navale du Pacifique au sujet de l'action exercée par les missionnaires mormons à Tahiti ». Le Capitaine de Vaisseau Adigard s'étonne du « drainage d'argent fait par les missionnaires mormons et qui ne laisse pas d'appauvrir le pays... du monopole de la pêche de la nacre aux Tuamotu... des insinuations sur les États-Unis d'Amérique qui forment la plus puissante nation du monde et de son Gouvernement qui est le meilleur... À ce propos n'est-il pas remarquable que le Gouvernement américain s'impose une dépense pour subventionner la malle de San Francisco à Tahiti ? Il ne peut venir à l'idée de personne qu'il soit commercialement utile au commerce américain d'avoir des relations d'affaires avec un petit archipel perdu à plus de 7 000 kilomètres... Quels sont les motifs avoués et inavoués ?... Les missionnaires mormons, dans les îles Tuamotu, deviennent tous les jours plus audacieux.

Cette propagande américaine resserre les mailles du filet qui entoure nos possessions océaniennes. Dans le but d'y mettre obstacle... j'ai donné l'ordre... de ne donner de charbon de la Marine Nationale aux bâtiments de guerre américains qu'autant que l'humanité le commanderait... Quatre Gouverneurs se sont succédés dans ces six dernières années... ; ils se sont trouvés d'accord sur les mesures à appliquer aux missionnaires mormons, savoir l'expulsion »[24].

On se doute bien que, malgré une amélioration sensible des relations entre les Mormons et Sanitos avec les Autorités françaises en Polynésie après les deux guerres mondiales, une certaine réserve et incompréhension subsiste. Les relations avec les États-Unis, bien que très rapidement développées depuis 1961, ne sont pas sans souffrir d'un tel climat. Est-ce pour cela que le Consulat des États-Unis à Papeete a été fermé le 30 avril 1965, juste avant les premiers essais atomiques ? Bien qu'il en soit toujours question, sa réouverture n'était pas réalisée en 1982. On ne peut que constater l'importance de « l'inavoué », du « non-dit » dans ce jeu relationnel, historiquement très complexe en Polynésie, entre les États-Unis et la France ; l'interférence des confessions religieuses d'origine américaine ne joue pas, sur ce plan psychosocial, un rôle négligeable. Les relations sont tout à la fois d'admiration et de crainte, d'attrait et de susceptibilité, de besoin des dollars et de méfiance des Américains. Français et Américains ont le même enracinement collectif et historique dans la « Liberté » ; mais ils ne l'expriment pas socialement et politiquement de la même manière. Il n'y a pire querelle que les disputes de famille, surtout lorsque la religion et la politique y sont mêlées.

Ce bref chapitre ne pouvait que suggérer l'importance historique et la complexité évolutive de la présence des groupes religieux et des sectes en Polynésie française dès 1844, seulement dix ans après l'arrivée des premiers missionnaires catholiques à Mangareva. Ces chapitres VI et VII ne sont qu'un aperçu sommaire de l'environnement religieux non catholique où la Mission des Pères des Sacrés-Cœurs va désormais évoluer. Comme tout ce qui regarde la Polynésie, la littérature sur les diverses missions religieuses, leurs relations réciproques et les interventions de l'État comme des diverses autorités est absolument inépuisable. Aussi exactement que faire se pouvait, une chronologie détaillée a été établie ; elle est reproduite en annexe. Les principaux événements ont été situés dans leur contexte et les références essentielles citées pour que chacun puisse s'y reporter en toute clarté et honnêteté.

Désormais, le cadre étant fixé et l'environnement dessiné, essayons de revivre « les joies et les espoirs, les tristesses et les angoisses » de la Mission catholique en Océanie Orientale, née à l'automne 1792 dans le cœur de Pierre Coudrin.



 

[14] Voir ci-dessous les chapitres XVI et XVII.
[15] Gouverneur PAGE au Ministre de la Marine, F.O.M. Océanie C 13, H 69 : rapports du 16-3-1853, 22-6-1853, 5-12-1853.
[16] Gouverneur au Ministre ; rapport du 13-4-1884, F.O.M., Océanie C 106, H 2.
[17] Voir chapitre III, « Protectorat incertain », note 10 de P. Y. TOULLELAN.
[18] Gouverneur LAVAUD au Ministre; rapport du 4-9-1849, F.O.M., Océanie, C 107, H 8.
[19] Gouverneur BONARD au Ministre, en 1850 ; F.O.M., Océanie C 106, H 2. - Mémorial polynésien. T. Il, p.389.
[20] Gouverneur PAGE au Ministre ; rapport du 17-11-1852, F.O.M. Océanie C 13, H 69.
[21] Toute cette affaire se trouve dans de gros dossiers : Ar.SS.CC. 73,1 ; 73,2. Spécialement : A. MONTITON à Mgr DOUMER (16-12-1852), annoté par Mgr T. JAUSSEN. Gendarmes et colons au Gouverneur et à Mgr T. JAUSSEN (déc. 1852, 18-10-1853). Lettres C. FOUQUE de 1852 à 1853. Lettres F. LOUBAT de 1852 : Ar.SS.CC. 62,3.
[22] Ministre à PAGE (1-12-1853), F.O.M., Océanie C 13, H 69.
[23] Gouverneur JULLIEN au Ministre, rapport du 10-1-1906, F.O.M. Océanie C 98, H 40.
[24] Ministre des Affaires Étrangères à Ministre des Colonies : 2-4-1905, transmettant le rapport Adigard du 18-1-1905 à l'Ambassade de France à Washington. F.O.M. Océanie C 98, H 40.

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