20131005 - Journée Mondiale de la Catéchèse

Journée Mondiale des Catéchistes à Maria no te Hau de Papeete

Conférence de Père Pascal IDE

Le Père Pascal IDE, de la Communauté de l’Emmanuel a donné une conférences aux catéchistes rassemblés à l’église Maria no te Hau de Papeete à l’occasion de la Journée Mondiale de la Catéchèse. Voici la retranscription de son intervention faite par le Frère Yvon DENIAU, f.i.c.

Nous sommes aujourd’hui unis à toute l’Église. Des millions de catéchistes vont célébrer la joie de transmettre ce qu’ils ont reçu.

Dans le discours apostolique, Mt 10,8, Jésus dit : « Vous avez reçu gratuitement, donnez gratuitement. »

Vous donnez par surabondance : vous avez déjà reçu la foi. On ne conçoit pas un catéchiste qui n’aurait pas la foi. La meilleure manière de savoir que la foi est dans notre cœur, c’est de la donner. Quand on la donne, on donne quelque chose qui est en soi.

On va parler ce matin de la foi. J’ai entendu comme vous l’évangile de la femme hémorroïsse.

Cet évangile paraît un peu curieux : comme si des énergies sortaient de Jésus. Mais ce n’est pas le sens. Le sens de cet évangile, c’est qu’il nous parle de Dieu. Dieu, c’est comme le soleil.

Il dit quelque chose de Dieu. Le soleil est un astre qui rayonne partout, dans toutes les directions, et tout le temps. La joie du soleil est de se donner sans retour. Le soleil nous parle de Dieu : Dieu se donne partout et tout le temps. Son seul bonheur est de donner. Jésus est Dieu fait homme. La joie de Jésus est de donner. Jésus n’a qu’une seule attente : se donner. Comme s’il était rempli, c’est de se verser dans l’âme qui s’approche de lui. Une femme malade s’approche de Jésus, elle perd du sang et le touche… avec foi, elle seule. La joie de Jésus est de se précipiter dans une âme où il y a de la place. On ne remplit pas quelqu’un qui est rempli. Jésus attend de nous la foi.

La foi, c’est comme quelque chose qui agrandit l’âme pour recevoir Dieu autant que Dieu veut se donner à nous. Cette femme qui à la foi, elle a la place. Elle permet à Dieu d’être Dieu, de se donner, de nous remplir. Jésus est touché, dans tous les sens du terme : physiquement et au cœur.

Dieu guérit. Le responsable du bureau médical à Lourdes pendant dix ans me disait : « Ce que Dieu aime faire à Lourdes, ce n’est pas d’abord de guérir, mais de donner la foi. »

La foi rayonne ensuite dans le corps et guérit. Plus on a la foi et plus Dieu peut remplir nos cœurs. Le sens de l’année de la foi est de poser tous les jours de petits actes de foi.

Six points.

1. Est-ce que la foi est digne ou indigne de l’homme ?

C’est une question non pour les Polynésiens, mais pour les Occidentaux. En Europe, le 18e siècle a été appelé le siècle des Lumières.

L’Occident a été tenté par l’orgueil, au point de croire que l’intelligence humaine suffisait pour tout comprendre et être la source de tout. On a dit : « La raison, c’est la lumière. La foi, c’est l’obscurité. » Quelle erreur ! Comme si nous étions la source de notre être… Le nombril nous rappelle que nous ne nous sommes pas donné la vie.

Un savant disait son incroyance au Curé d’Ars. Celui-ci le regarde et, avec compassion, répond :

- « Vous ne croyez pas que Dieu existe ? »

- « Non ! »

- « Alors vous en savez encore moins que ma sacristine ? »

Un prix Nobel de chimie, quand sa fille va mourir, aura-t-il recours à la chimie pour répondre à ses questions ? La raison est importante, mais pas suffisante.

Jean-Paul II emploie une image : L’être humain a besoin de voler avec deux ailes : l’aile de la raison et l’aile de la foi. On a besoin des deux lumières.  Crevant le plafond de nuages, l’avion atteint la lumière. Notre vie reçoit de la lumière, mais elle est comme sous les nuages. Derrière les nuages, il y a la lumière qu’est Dieu.

Jn 17,3 : « La vie éternelle, c’est de te connaître, toi, et ton envoyé Jésus-Christ. » La foi, c’est marcher sous les nuages. Un jour on traversera les nuages et on verra Dieu. Les incroyants croient que la lumière sous les nuages est la totalité de la lumière, alors que l’homme est fait pour l’Infini.

2. Mais, finalement, ne faudrait-il pas plutôt dire : « Dieu, on ne le voit, donc on ne sait pas » ?

Dieu existe-t-il ? Ne vaut-il pas mieux être agnostique ?

Abstraitement, ça paraît logique. Mais l’important n’est pas ce que je pense, mais ce que je vis.

Or il y a deux solutions : ou je vis avec Dieu ou je vis sans Dieu.

L’agnostique vit sans Dieu. Ne nous arrive-t-il pas de passer une matinée entière sans penser à Dieu, en vivant comme un athée ?

On posa la question à sainte Thérèse : « Ça t’arrive de ne pas penser à Dieu ? »

Elle répond : « Ô oui, parfois deux ou trois minutes ».

Quand on parlait à Bienheureux Daniel Brottier, il était tellement habité par le bon Dieu qu’il recueillait ce qu’on lui disait et quand il répondait, après un certain temps, ce qu’il disait ne venait pas seulement de lui.

La question n’est pas seulement de croire en Dieu, mais de vivre avec lui.

L’encyclique de François, Lumen fidei,  dit que la foi n’est pas une question de tête, mais de toute la vie : vivre avec Dieu, en s’appuyant sur lui. « Dieu, viens à mon aide ! » Je n’y arrive pas. Parfois on  projette ce qui ne va pas bien en nous sur les autres. Il vaudrait mieux dire le Ps 22/23. « Passerais-je un ravin de ténèbres, tu es avec moi ! »  Tu es avec moi : c’est une expérience. Nous passons des ravins de ténèbres. François d’Assise allant évangéliser les musulmans avait tellement peur qu’il répétait en boucle cette parole

On n’est pas des agnostiques, des athées. On supplie le Seigneur : « Donne de vivre avec toi, toi qui es toujours avec nous ! » Il est important de faire prier les enfants et qu’ils vous voient prier. C’est comme les parents. Les enfants voient-ils les parents prier ?

Cela a marqué bien des gens. « Comment ! Mon père s’agenouille devant Quelqu’un d’autre ? » Sainte Edith Stein est rentrée un jour dans une église et voit quelqu’un qui venait du marché. Elle se dit : Dieu habite dans le silence des cœurs ? Et elle a commencé son chemin vers la foi.

3. La foi : un don de Dieu ou est-ce que ça vient de l’homme ?

Part de Dieu, part de l’homme ? Question piège : cela vient des deux. Mais la foi est d’abord un don de Dieu. Paul le vit lors de sa conversion. André Frossard rentre dans une église incroyant, il en sort croyant. Mais Dieu vient aussi à la rencontre de notre désir.  Il dit à Sainte Catherine de Sienne : « Fais-toi capacité, je me ferai torrent. » Dieu teste notre désir. Il sait que plus on désire, plus il y a de la place en nous pour le recevoir.

Le cardinal Daneels, évêque de Malines-Bruxelles, disait que son père lui avait promis une bicyclette. Il l’a attendue un an. Ce fut une fête lorsqu’il la reçut. Aujourd’hui, c’est « tout, tout de suite ! ». Alors on ne reçoit pas beaucoup.

Dieu aime qu’on le cherche. Lisez et relisez le Cantique des Cantiques : le Bien-aimé, de temps en temps, se cache. Il y aussi la part de l’homme qui cherche Dieu pour toujours grandir davantage dans la foi.

Jésus aime bien les paraboles végétales. Les chiens, les fourmis s’arrêtent de grandir. Pas les arbres. Pour faire grandir la foi, il suffit de dire : « Jésus, je crois en toi. » Saint Jean de la Croix, disait : « Lorsque je dis à Dieu, Jésus, “je crois en toi”, je suis immédiatement uni à Dieu. » C’est le cœur de la vie spirituelle. Lorsqu’on me dit : « Tu sais, j’ai confiance en toi », on est touché.

Dieu, infiniment plus sensible que nous, est touché lorsqu’on dit qu’on a confiance en lui et qu’on le lui répète.  Multipliez ces petits actes de foi. Plus on croira, plus on vivra cette confiance… Saint Claude de la Colombière priait : « Mon Dieu, je suis si persuadé que tu combles ceux qui espèrent en toi et que rien ne peut manquer à ceux qui attendent toute chose de toi que j’ai résolu désormais de vivre sans aucun souci et de me décharger, sur toi, de toutes mes inquiétudes. »

La foi nous parvient aussi par le Magistère de l’Église : "Qui vous écoute m’écoute". St Thomas d’Aquin se demande : « Est-il possible de ne pas croire à un des articles du Credo ? » Cela revient à se demander s’il est possible d’être chrétien à 95% ? Saint Thomas répond : « Si je ne crois pas à tout, c’est que je me mets au-dessus des articles du Credo ». Ma foi est humaine, elle n’est pas reçue de Dieu. Croire, c’est tout croire.  Si je fais confiance, je fais confiance à tout.

4. La foi est-ce que c’est quelque chose que l’on ressent ou est-ce quelque chose qui est au-delà de ce qu’on ressent ?

La question n’est pas très simple. L’enfant baptisé ne ressent rien. Le fait qu’il pleure n’est pas le signe qu’il a reçu la foi. La Trinité vient faire sa demeure dans le cœur d’un enfant. Il ne ressent rien. C’est au-delà du sensible. Saint Augustin dit que lorsque Dieu donne sa grâce, il fait plus grand que lorsqu’il crée tous les anges ensemble. La grâce est plus grande que toute la création.

Mais il faut ajouter que la foi reçue au baptême doit devenir mienne. Les parents donnent des règles. Mais ces règles doivent devenir mes propres règles. C’est le sens de la profession de foi : c’est moi qui dis « Je crois ». Et on peut vivre aussi une expérience. Personnellement, j’avais toujours été croyant. Un jour, j’ai été faire une retraite à Châteauneuf de Galaure. On nous a dit : l’important, ce n’est pas d’entendre des enseignements, mais de prier. Je suis entré dans la chapelle pour cinq minutes et j’en suis ressorti après trois quarts d’heure. J’ai fait une expérience. Il y a eu un « avant et après Jésus-Christ ». J’ai vraiment fait cette expérience, à vingt-deux ans. Il devenait facile de prier, de lire la Parole de Dieu, Dieu me parlait…

J’ai aussi fait l’expérience d’une joie qui a commencé à diminuer. Je me posais alors des questions. J’ai été très éclairé par une parole de Jésus à Sainte Catherine de Sienne : « Il arrive un moment où je me retire par le sentiment mais pas par la grâce. » Il y a un moment où on ressent beaucoup de choses. Et il y a un moment où Dieu retire tout ce qu’on ressent, mais continue à demeurer dans l’âme par la grâce qu’il nous donne. Il veut qu’on multiplie les petits actes de foi. Imaginons qu’à chaque fois qu’on viendrait à la messe, on recevrait un lingot d’or !… Viendrait-on à la messe pour Dieu ou le lingot d’or ? Ce serait une drogue…

Dieu veut qu’on vienne pour lui et non pour ses dons. La foi est un acte par lequel on se donne à Dieu. Il y a des nuages, mais Dieu est derrière les nuages. Si on continue, Dieu sait qu’on le fait pour lui. Lorsque Dieu aime, c’est gratuit. Il nous force à la gratuité. Il nous transforme.

5. La foi est-elle une certitude ou bien avec la foi y a-t-il des doutes ?

Dans la foi, il n’y a pas une goutte de doute. Certains disent : « La preuve que je crois, c’est que je doute ! ».  La foi n’est pas le savoir, c’est vrai. Dans la prière, on ne voit pas.  Alors l’esprit a tendance à divaguer, il a des distractions.

Mais ce qui caractérise la foi, c’est que, même s’il n’y a pas évidence, il y a certitude.  Si vous avez en vous un doute, dites-vous que le doute est une tentation contre la foi. Sainte Thérèse a été tentée à la fin de sa vie. Mais c’est une tentation qu’on écarte. Dans le mariage, on ne peut pas savoir, on ne peut pas être certain que l’autre nous aime. On ne peut que croire l’autre. Le jaloux est celui qui veut savoir. Il veut savoir quelque chose qu’il ne peut pas savoir. Cela vaut pour la relation à Dieu. On ne peut pas douter de celui qu’on aime. Dieu est digne de foi. Et il donne des signes. « Il m’a aimé et s’est livré pour moi », dit Paul (Ga 2,20). Il a été jusqu’à l’extrême.

La foi exclut le doute, mais pas les questions. L’évangile de Luc 1 met en scène Zacharie et Marie, en parallèle. L’ange apparaît à Zacharie et à Marie. Des deux côtés on a une question. Mais ce n’est pas la même question. La question de Zacharie est une question de doute. Celle de Marie est celle qui veut en savoir davantage. Un ami pose des questions. On a le droit de poser des questions. Est-ce que le purgatoire existe ? Ce n’est pas douter, mais vouloir se former plus.

6. Quelques petits moyens pour augmenter la foi.

D’abord la parole de Dieu. Vous aimez la Parole de Dieu. Le christianisme est-il une religion du livre ? Non ! C’est une religion de la Parole. Lire la Parole de Dieu en cherchant Jésus. Sainte Thérèse aurait aimé parler grec et hébreu pour lire la Parole de Dieu. Sacristine, elle aimait se refléter dans le calice. De même qu’elle aimait l’eucharistie, elle aimait la Parole de Dieu. Il faut lire la parole de Dieu, apprendre des versets. Il y a la table eucharistique et la table de la Parole. Benoît XVI a beaucoup insisté là-dessus. Autrefois, il y avait les messes des rogations où l’on demandait d’avoir de la pluie. La foi des gens était telle qu’ils allaient à la messe avec un parapluie. Le cœur de l’homme est dur. La nature est beaucoup plus obéissante.

C’est le vingtième anniversaire du Catéchisme de l’Église catholique. Peut-être a-t-il de la poussière sur lui. On attendait un catéchisme depuis trois siècles et demi. C’est peut-être la plus belle œuvre de Jean-Paul II. On a tout. On a l’Abrégé aussi. Il y a 598 questions dans cet Abrégé. Vous pourriez vous lancer un défi : imaginer que l’on apprenne une question par jour, avec sa réponse. En à peine deux ans, vous connaîtriez tout. Tous les jours, apprendre. Dieu ne le mérite-t-il pas ?

L’essentiel, ce n’est pas de connaître, mais de faire l’expérience de Dieu en nous. Jésus veut nous visiter, avoir une relation personnelle avec nous. Par la bouche du prêtre, il vient nous rejoindre. « J’ai rencontré Dieu un jour où je cherchais de la fraîcheur à l’église. »

Un vieil homme de 80 ans cherchait un endroit frais, car il faisait très chaud !... Il était connu comme mécréant. Il commence à avancer dans l’église. Et puis il avise un banc, rentre dans le banc, s’asseoit. Au moment où il s’asseoit, c’est comme s’il s’asseyait sur quelqu’un et il sent deux bras qui l’entourent et comme quelqu’un qui lui dit : « Ça fait si longtemps que je t’attendais ! » Expérience de Dieu qui bouleverse notre vie.

C’est parfois ingrat d’être catéchiste. On n’est pas nécessairement reconnu… La dame-caté, c’est parfois celle dont on n’attend rien d’autre… Si on ressent de la rancœur… il faut la remettre… La rancœur c’est le cœur qui rancit. Le beurre rance ne sent pas bon. On peut humblement demander à Jésus un petit signe de reconnaissance. Jésus vous le donnera. Mais il ne faut pas entretenir la rancœur. Il faut redire oui comme catéchiste et, en le disant, se redonner à Jésus, gratuitement.

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